C’était le 8 mars 2020, Journée des Droits des Femmes. On entend parler des mesures imaginées par Muriel Pénicaud, Ministre du Travail, pour que la progression des femmes devienne une réalité1, de la parité, de l’égalité des salaires, de la nécessité pour les femmes d’oser, d’apprendre à oser, de pouvoir faire le choix de leur vie professionnelle sans barrières. De nombreux progrès, ô combien nécessaires, ont été faits. En revanche, le « métier » de femme au foyer reste le parent pauvre de cette progression sociale des femmes2.
Les femmes sont poussées à travailler pour réussir, pour gagner de l’argent ou tout simplement pour couvrir les frais de garde de leurs enfants. L’envie d’élever ses enfants est, quant à elle, balayée par l’ascenseur social ou le besoin financier. Et pourtant, nombre de mamans voudraient élever leurs enfants, au moins quelques années.
Mais aujourd’hui, la « femme au foyer » n’a pas de statut social. Étant dépourvue de profession, elle n’entre même pas dans le décompte de la population active : pas de statut, pas de protection, pas de salaire, pas de retraite – rien ! En cas de divorce ou de décès du conjoint, la femme qui a élevé ses enfants se retrouve sans rien : elle doit repartir de zéro. Femme au foyer se désigne aussi comme un choix d’inactivité3. D’ailleurs, que fait-elle de ses journées ? Cette question est souvent sur les lèvres de ceux qui n’ont pas expérimenté la gestion d’une maison avec des enfants. Quelle que soit la taille, une maison avec des enfants est une vraie entreprise managée par la femme au foyer (quels que soient ses compétences et son niveau d’étude) : stratégie de l’entreprise (comment gérer la famille, faire évoluer les enfants, assurer la cohésion et le développement familial, les activités scolaires et parascolaires, la socialisation, les apprentissages divers, etc.), politique publique (relations avec les écoles, l’administration, etc.), politique RH (recrutement, management et gestion des personnels de garde ponctuels et de ménage), gestion des plannings (journaliers, mensuels, annuels avec les devoirs, les activités, la tenue de la maison, les courses, le ménage, les rendezvous médicaux, les démarches administratives), conduite de projets (activités sportives, rééducation ou orthodontie, travaux dans la maison, organisation des vacances…), management du budget (familial), politique achat (recherche des promotions notamment pour l’habillage et les fournitures, achat de services plomberie, électricité, etc.), data management (démarches administratives, classement, …).
Par bonheur, nombre de ces activités sont maintenant partagées au sein des couples mais le gardien du rythme qui doit s’assurer que tout est fait en temps et en heure avec le niveau de qualité décidé reste souvent la femme au foyer. Les KPIs (Key Performance Indicator – indicateurs de performance) sont aussi sévères que séculaires : enfants civiles et en bonne santé dans une maison propre et chaleureuse offrant une table avec des repas variés (« 5 fruits et légumes / jour »). Le ROI (Return on investment retour sur investissement) est à court, moyen et long terme matérialisé par l’évolution de tous les membres de la famille ; une évolution capitale car elle permet d’une part, au conjoint qui travaille de progresser dans sa carrière en pouvant se ressourcer dans une maison « chaleureuse » sans avoir « l’intendance » en tête de sa To Do et d’autre part, aux enfants, richesse de notre société, piliers de notre avenir, de grandir au mieux pour être les adultes de demain.
Pourquoi devrait-on choisir entre travailler et ne pas exister si l’on veut exercer l’un des plus beaux métiers du monde : élever ses enfants ?
La création d’un statut juridique avec une protection sociale n’est pas une tâche aisée mais ne mérite-t-elle pas d’être tentée ? En hommage à toutes les Mamans.
Véronique Chapuis
LEX Colibri
Spécialiste de l’Intelligence Juridique et de l’Ergonomie du Droit.
Simplifier le Droit et Accompagner le Changement.