Coup de Cœur Média

La e-recommandation de Michelle Jean Baptiste

Martine Abbou
Ecrit par Martine Abbou

Hommage aux peintres de l’éphémère

Elles sont dans l’ombre, dont elles vous disent apprécier la douceur, et pourtant la mise en lumière n’a pas de secret pour elles. Leurs mains et leur œil font des miracles. Elles savent, d’un coup de pinceau, posé sur votre joue comme une plume, rehausser vos couleurs et votre bonne humeur. Blotties au cœur d’une petite pièce qu’on imaginerait presque capitonnée, elles vous accueillent sur un large fauteuil confortable qu’elles actionnent au pied pour que vous preniez de la hauteur. Ainsi positionné, à porter de leur doigté, la magie de leurs gestes souples commence à opérer. Il ne vous reste plus qu’à respirer et à vous laisser faire ; votre regard posé sur l’établi d’un peintre qui a choisi le visage pour toile de prédilection. Les petits pots, les éponges plates ou biseautées, les crèmes fluides, les boîtes et les poudres vous font face et se côtoient dans une variété de tons à l’ombre d’un petit arbre original et exotique, constitué d’une multitude de pinceaux à poils longs.

“Comment avez-vous l’habitude de vous maquiller ?” La première question est posée tout en chaleur et en subtilité. Douceur de la voix, phrase soufflée presque dans un murmure ; elles savent bien, elles, tout ce qui peut s’exprimer dans cette sphère de l’intime et de l’image de soi trop souvent bousculée. Et lorsque vous leur répondez “au plus naturel”, elles ont compris. Nul besoin d’en dire plus car elles vous répondent déjà un complice “je vois”. Il faut dire qu’elles ont l’œil : l’œil du professionnel sur ce qui vous sied ou non, sur ce qui vous anime ; l’œil qui en a vu passer des caractères variés, des égos bien trempés, des moments de joie feinte ou réelle, des temps de solitude ou de longues nuits sans sommeil ; et puis l’œil pétillant des personnes qui aiment leur métier. Nous avons échangés de tout et de rien, avec plaisir, et de la vie aussi, entre deux « regardez en bas » accompagnant l’envolée du rimmel sur une paupière. C’est ainsi que l’on découvre une belle destinée. 35 ans de métier nés au creux du hasard ou de la providence. Elle voulait être danseuse, puis, toute jeune, un accident de voiture suivi d’une mise en relation et enfin d’une rencontre déterminante la propulse dans la passion du maquillage. Elle apprendra en faisant, en pratiquant. Quelle belle éducation que celle de l’expérience ! Tous ses gestes sont assurés comme dans une chorégraphie complètement intégrée. Alors de qui se moque-t-on lorsque l’on dépeint le maquillage comme superficiel alors que sous les poudres il faut bien composer avec le duo corps et âme toujours en échappé.

Je les ai rencontrées, ces deux dames, ces deux peintres de l’éphémère, samedi dernier dans les coulisses de “la voix est libre” sur France 3 et je n’ai même pas eu le temps de leur demander leurs prénoms. C’est dire leur modestie et leur humilité. Mais je voulais leur rendre cet hommage et leur redire merci de faire ce qu’elles font ; de vous donner confiance juste par l’attitude et par quelques mots bien sentis offerts entre deux portes, vous permettant ainsi, juste avant de rentrer dans l’arène du direct, de faire la peau au trac et aux idées reçues.